Charles-Edouard Bouée
A l'heure où l'on pense que nos existences se digitalisent à grande vitesse et que c'est sur Instagram ou dans Fortnite que nos contemporains passent l'essentiel de leurs journées, il ne faut pas sous-estimer l'importance du mouvement inverse. Certes, le monde réel se numérise, mais dans le même temps, le virtuel part à la conquête du monde réel. C'est ainsi que les influenceurs virtuels (avatars fictifs) sont en train de devenir un enjeu majeur, pour la vente de biens et de services dans le monde physique. On sait l'importance qu'ont prise les influenceurs humains dans le domaine du marketing digital, pour susciter l'engagement des consommateurs. Là, l'influenceur virtuel est un personnage numérique entièrement fictif, actif sur les réseaux sociaux.
C'est au Japon, en 2007, qu'est née la première influenceuse virtuelle, Hatsune Miku, création de Yamaha pour représenter la marque Vocaloid. Toujours très présent en Asie, le phénomène s'est mondialisé : Lil Miquela, influenceuse virtuelle brésilienne (fictivement basée à Los Angeles) qui cumule des millions d'abonnés sur Instagram, TikTok et YouTube, est célèbre pour ses posts pour des marques de luxe, Calvin Klein ou Prada. Citons encore Lu do Magalu, également active sur le marché brésilien, Bangkok Naughty Boo en Thaïlande, ou Shudu Gram, créée par le photographe britannique Cameron-James Wilson, devenue l'égérie de la marque de cosmétiques de Rihanna.
Eternellement jeune et à la mode, l'influenceur virtuel a aussi pour avantage de travailler sans interruption, et donc d'atteindre des niveaux « d'engagement » beaucoup plus élevés que ses collègues humains. Les marques l'ont bien compris, et le phénomène est en plein essor. Il pourrait d'ailleurs ne pas se limiter aux influenceurs : le géant chinois de la téléphonie Huawei a annoncé cet automne avoir recruté leur première employée virtuelle, Yunsheng. Pour l'heure, ce sont des gens bien réels qui sont derrière ces personnages virtuels, qui empochent leurs revenus ou les fruits de leur travail. Mais jusqu'à quand ? Le physique et le virtuel sont en passe de devenir complètement indémêlables.
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