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Photo du rédacteurThierry Bardy

La France se penche à son tour sur les « zones d'ombre » de TikTok


Florian Dèbes


L'appli de vidéos courtes fait l'objet d'une commission d'enquête au Sénat. Le gouvernement se montre très attentif aux risques que pose TikTok.

Après les Etats-Unis, l'Europe et la France mettent TikTok dans leur viseur. L'application de vidéos courtes revendique plus de 15 millions d'utilisateurs en France et son succès auprès des annonceurs ne faiblit pas. Depuis lundi, ses origines lui valent de passer au grill d'une commission d'enquête au Sénat.

Très critiquée outre-Atlantique pour ses liens supposés avec les services de renseignement chinois, l'appli créée à Pékin mais gérée en partie depuis les Etats-Unis et l'Irlande pour ses activités hors Chine présente des « zones d'ombre », selon les sénateurs français. D'ici la fin de l'été, ceux-ci vont s'atteler via des auditions à faire la lumière sur les spécificités nationales de l'algorithme qui personnalise pour chaque utilisateur son flux de vidéo. Il s'agit ainsi de vérifier « si ces différences de fonctionnement ont pour objet ou pour effet de servir une stratégie tendant à porter atteinte aux utilisateurs étrangers de TikTok, à la cohésion ou à la sécurité des Etats étrangers », notent-ils dans l'exposé des motifs de la commission d'enquête.

Une audition sous serment

Pour leur première audition, les sénateurs ont questionné sous serment le chercheur en intelligence artificielle Marc Faddoul, que TikTok considère comme critique à son égard. Pendant plus d'une heure, en fin de journée, le spécialiste des algorithmes a dépeint une appli aussi critiquable que ses rivaux américains sur les questions de sélection automatique des contenus recommandés. Tout en ajoutant que l'origine de l'application en provenance d'un Etat non démocratique pose des questions supplémentaires. Des messages évoquant les événements de la place Tian'anmen y ont été, par exemple, censurés par le passé.

Le chercheur a aussi porté l'attention des sénateurs sur la technique du « heating » qui permet à des salariés de la plateforme d'amplifier la portée des thématiques de leurs choix. « Nous n'avons pas la preuve que des messages politiques ont été poussés ainsi, mais la fonctionnalité existe », expliquait-il. En désaccord, TikTok considère que ses équipes dirigent l'application en toute indépendance du pouvoir chinois.

Alors que la question du transfert des données vers la Chine est brûlante pour les CNIL européennes, les élus se pencheront aussi sur le respect des obligations de l'application en matière de protection des données à caractère personnel. Mais cette commission d'enquête n'est pas le seul tour de vis à l'étau qui semble doucement se resserrer autour de TikTok en France. Au gouvernement, on est aussi très attentif au risque que pose l'appli, aussi bien en termes d'influence pour le compte d'une puissance étrangère - qui plus est auprès d'un jeune public - que d'espionnage.

Un partenaire européen

A l'issue d'une rencontre, vendredi 10 mars, entre le ministre de la Transition numérique, Jean-Noël Barrot, et le secrétaire général de TikTok, Erich Andersen, Bercy faisait savoir que la France attendait des précisions quant au calendrier de déploiement des récents engagements de TikTok sur la sécurité des données. Le groupe indique avoir trouvé un partenaire européen pour contrôler qui accède en coulisse aux informations de l'application. Mais sans indiquer le nom de ce partenaire ni même la date de mise en oeuvre de ce plan.

En tournée européenne, le porte-parole de TikTok a rencontré lundi le président de l'Arcom, Roch-Olivier Maistre. L'autorité chargée de la régulation des plateformes numérique sur la question des contenus s'était déjà alarmée en novembre dernier de l'opacité des équipes de TikTok. Son questionnaire sur les moyens contre la désinformation en ligne lui est revenu avec des réponses très incomplètes. L'Arcom sera probablement chargé à partir de l'an prochain de faire appliquer le Digital Services Act européen et son lot d'obligations de modération des contenus sur les grandes plateformes numériques comme TikTok.

Avant cela, la France aura sans doute étayé sa réflexion quant à l'interdiction de l'appli d'origine chinoise sur les smartphones des fonctionnaires. Dans la foulée d'une décision de la Commission européenne bannissant TikTok des smartphones de ses fonctionnaires par crainte d'espionnage, le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, avait assuré début mars que cette règle prévalait déjà dans certains ministères régaliens et que l'extension de la mesure dans d'autres administrations était à l'étude.

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