Laurence Boisseau
80 % des entreprises du SBF 120 disposaient d'un comité RSE en 2023, contre 25 % en 2015. Une raison d'être figure dans les statuts de 16 sociétés.
Les sujets environnementaux et sociaux ont fait leur chemin dans les instances dirigeantes des sociétés cotées depuis plusieurs années. « Il y a dix ans, les conseils recrutaient des administrateurs avec des compétences en digital, aujourd'hui, ils cherchent des spécialistes de la RSE [Responsabilité Sociale et Environnementale, NDLR]) », explique Diane Segalen, fondatrice du cabinet Segalen Associés.
En 2023, Legrand a nommé Valérie Chort comme administratrice. Responsable pour la zone Amérique du développement durable et du changement climatique pour Deloitte, elle est vice-présidente de la citoyenneté d'entreprise et du développement durable de la Banque royale du Canada. Un an plus tôt, Engie avait choisi Marie-Claire Daveu, directrice du développement durable et des affaires institutionnelles de Kering, pour entrer dans son conseil.
En 2023, 57,5 % des conseils d'administration du CAC 40 ont déclaré avoir au moins un membre disposant des compétences spécifiques en RSE, selon le baromètre réalisé par l'IFA (Institut Français des Administrateurs) et Ethics & Boards, en septembre dernier. En comparaison, seule une entreprise allemande de l'indice DAX déclare la même chose.
Un comité dédié et non combiné avec un autre
Outre les administrateurs, le nombre de comités chargés de la RSE dans les conseils a connu une croissance exponentielle. 80 % des entreprises du SBF 120 en était dotés en 2023, contre 25 % en 2015, soit plus d'un triplement en huit ans. La France est, par ailleurs, le pays où les entreprises sont les mieux dotées en comités RSE, très loin devant ses voisins (l'Allemagne ou la Grande-Bretagne), mais aussi des Etats-Unis. Dans 41,7 % des cas, il s'agit d'un comité dédié et non combiné avec un autre.
La raison d'être a également bien progressé au sein des entreprises, signe que la loi Pacte - en vigueur depuis mai 2019 - porte ses fruits. En 2023, seize sociétés (Danone, Orange, Icade, ou encore Nexity…) ont défini une telle raison d'être et, signe de leur implication sur ce point, l'ont inscrite dans leurs statuts, selon l'IFA et Ethics & Boards. Elles n'étaient que deux en 2019. Autre signe que les enjeux sociaux et environnementaux sont bien pris en compte, deux tiers des entreprises du SBF120 se distinguent aussi pour avoir pris des engagements concrets en matière de transition énergétique, contre 36 % en 2021. Cinquante et une sociétés figurent dans la liste A du CDP (anciennement Carbon Disclosure Project), selon le baromètre IFA et Ethics & Boards.
Cette liste, élaborée par le CDP - organisation à but non lucratif qui gère la principale base mondiale de données environnementales des entreprises -, met en avant les sociétés les plus transparentes en matière de reporting environnemental selon trois thèmes (climat, eau et forêt). Parmi elles, Engie, Danone, et L'Oréal. En 2021, les entreprises hexagonales n'étaient que 24 à figurer dans cette liste. La France est le pays qui y est le mieux représenté. Neuf groupes cotés (dont Schneider Electric, Klepierre, Carrefour) ont soumis leur stratégie climat au vote des actionnaires lors des assemblées générales en 2023, contre 2 en 2020. En Espagne, en Allemagne, ou au Royaume-Uni, cette pratique est bien plus rare. Enfin, et pas des moindres, le mode de calcul de la rémunération des dirigeants évolue. 99 % des sociétés utilisent au moins un critère RSE dans la rémunération variable de leurs dirigeants, contre 90 % un an plus tôt, selon le guide pratique de la RSE rédigée par Herbert Smith Freehills. La part des critères ESG dans la rémunération variable annuelle est passée de 15 % à 2020 à 26 % en 2022, et de 9 % à 21 % pour la partie long terme, sous forme d'actions ou d'options de performance.
Le « Say On Climate » rate son entrée dans la loi en France
Sujet de discorde entre les investisseurs et les entreprises, le « Say On Climate » a failli devenir obligatoire. Cette pratique consiste à faire approuver par les actionnaires la stratégie des entreprises pour lutter contre le réchauffement climatique. Fin juillet, dans le cadre du projet de loi sur l'industrie verte, les députés avaient voté un amendement dans ce sens. Mais en octobre, une commission mixte paritaire réunissant des députés et sénateurs a retiré cet amendement.
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