Yann Rousseau
Le plus grand constructeur automobile de la planète a suspendu, mardi, toute sa production au Japon suite au piratage du réseau de l'un de ses fournisseurs.
Toyota, le plus grand constructeur automobile de la planète, espérait relancer ses quatorze usines japonaises mercredi, 24 heures seulement après avoir annoncé qu'une cyberattaque sur l'un de ses grands équipementiers l'avait forcé à décréter la suspension, pour la journée de mardi, de la totalité de sa production dans le pays. « Nous avons décidé de reprendre toutes nos opérations dès le premier cycle de production du 2 mars », a annoncé le groupe dans un communiqué.
L'entreprise a découvert, dans le week-end, que le système informatique de la société Kojima Industries, qui lui fournit des composants électroniques et des pièces en plastique, a été attaqué par des hackers. Les ingénieurs de Kojima avaient découvert dans leur serveur un message en anglais associé à un rançongiciel demandant le versement d'une forte somme d'argent en échange du nettoyage d'un complexe virus informatiqueinfiltré dans son système.
Le système « just in time »
Si le réseau informatique de Toyota n'a pas été visé directement, il s'est retrouvé partiellement paralysé par l'arrêt du système orchestré chez Kojima. L'équipementier, qui fait partie des 400 fournisseurs de premier rang du constructeur, est pleinement intégré à son système de contrôle de production organisé en « just in time » ou « kanban », qui permet une réduction des stocks et une livraison, en flux tendu, des composants nécessaires à l'assemblage de chaque véhicule. Très efficace au quotidien, cette organisation se bloque en cas de problème chez l'un des fournisseurs.
Mardi, Toyota a ainsi dû stopper la production sur les vingt-huit chaînes d'assemblage de ses quatorze usines nippones ainsi que sur certains sites industriels de ses filiales Hino Motors, qui produit des camions, et Daihatsu Motors, un spécialiste des mini-voitures ou « kei cars ». Au total, cette journée d'arrêt devrait représenter pour les différentes marques du constructeur un retard total de production d'environ 13.000 véhicules, aisément rattrapable dans les prochaines semaines. Toyota assemble encore au Japon un tiers des 10 millions de voitures qu'il produit chaque année.
Les équipes de Kojima et de Toyota assurent qu'elles n'ont pas encore identifié l'origine exactede la cyberattaque. Elles refusent, pour le moment, de faire un lien avec la récente poussée des tensions entre Moscou et Tokyo, qui vient de s'associer aux sanctions mises en place par les Etats-Unis et l'Union européenne contre la Russie. Longtemps très tolérant à l'égard de Vladimir Poutine, le gouvernement conservateur japonais a haussé le ton en fin de semaine dernière, après l'invasion de l'Ukraine par les troupes russes, et déployé plusieurs mesures de rétorsion économiques et financières. Il va notamment restreindre les exportations de semi-conducteurs vers la Russie, participer à l'exclusion de « certaines banques russes » du système bancaire international Swift et même geler les actifs détenus par Vladimir Poutine au Japon.
Interrogé sur les éventuelles motivations politiques de l'attaque informatique menée contre Kojima Industries, le Premier ministre nippon, Fumio Kishida a indiqué qu'il était « encore difficile de se prononcer avant une véritable confirmation », avant de révéler qu'une enquête était en cours.
Ces dernières semaines, avant même le lancement de l'attaque russe, l'exécutif japonais avait demandé à ses entreprises, notamment aux structures moyennes, de se montrer plus vigilantes et de renforcer leurs efforts de cybersécurité.
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