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Expédition 2023 ATELIER 6

Qu'est ce qui fera Valeurs demain ?
Face aux transformations des systèmes de valeurs, comment les entreprises et organisations peuvent-elles agir, s’adapter, se structurer ?
Décryptage ...
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Les 5 creusets prospectifs identifiés et fouillés en profondeur lors de nos deux jours au campus d' Oxygène factory

- de la valeur travail à la valeur au travail
-les valeurs de la science et de la techonologie sont elles perennes ?
-la valeur de la vitesse et du rapport au temps
-les valeurs de la comptabilité extra financière transforme la valeur de l'entreprise
-Marketing Régénératif, les valeurs du marketing revisitées

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Le design prospectif , notre méthode ...

Exemple de brief de départ qui a été donné aux participants du creuser " Marketing" pour nourrir leur reflexion des 2 jours à Oxygene Factory .
Chacun des participants des 4 autres creusets avaient à leur disposition ce même type de matière de base à leur disposition .
C' est à  partir  de cette matière que le pitch final
"Marketing for good", les valeurs du marketing revisitées fut élaboré. Vous pouvez retrouver le pitch finalisé dans l'onglet de l'atelier 7 ou restitution finale à Néoma Business school.


Brief de départ :
Le thème de l’expédition 2023 du COP est « Qu’est ce qui fera valeurs demain », il est décliné en 5 creusets prospectifs dont l’un d’eux a fait émerger un marketing que nous appellerons 3.0 pour faire référence à un des pères du marketing à savoir P Kotler … « Marketing 3.0 ou régénératif, les valeurs du marketing revisitées »
J’attire votre attention que notre réflexion ne doit pas définir le marketing de demain, mais davantage les nouvelles valeurs du marketing de demain.
La distinction est très importante car seule la dernière démarche est de l’ordre de la prospective.
« Le concept du marketing 3.0 souhaite “rendre le monde meilleur” à travers l’action commerciale de l’entreprise » P.Kotler.
 

Contexte
Nous consommons les ressources 1,7 fois plus vite que ce que la Terre est capable de régénérer. La consommation est un objectif essentiel, qui doit désormais s’exercer avec de nouvelles ambitions et dépasser le consumérisme exacerbé que nous connaissons aujourd’hui.
Le marketing doit être repensé autour d’un nouveau système de valeur où les aspirations des clients et la préservation de la planète doivent être prises en compte, tout en conservant la rentabilité de l’entreprise. Sobriété heureuse et préservation de la rentabilité peuvent caractériser ce que nous appellerons le marketing régénératif ou 3.0.
Il est indéniable que l'intérêt pour le marketing 3.0 a augmenté rapidement ces dernières années. Après avoir été introduit en 2009 par Philip Kotler dans son livre Marketing 3.0 : produits, clients, facteur humain, le principe a rapidement fait écho auprès des acteurs du marché. De plus en plus d'entreprises ont ainsi commencé à s’engager dans des activités de marketing 3.0. Une émergence rapide qui peut entre autres, être attribuée à l'évolution des nouvelles technologies et l’usage qu’en font les consommateurs notamment avec les smartphones et ordinateurs sur internet. Tout ceci a radicalement changé les modes de collecte de données, de mise place de la communication et d’organisation de la publicité. De plus, plusieurs développements macro-économiques peuvent justifier l'émergence du marketing 3.0. On peut notamment citer la transition d'une approche linéaire vers une économie circulaire dans laquelle les nutriments biologiques réintègrent la biosphère en toute sécurité. Ou encore en matière de technologie ou d’énergie avec des composantes techniques conçues pour être recyclées, utilisées, réparées ou modernisées pour en réduire l’impact financier et environnemental. Par conséquent, le marketing 3.0 construit un nouveau concept qui traite de ces évolutions économiques et il est bien dans la sphère de la prospective.  

Les valeurs revisitées du marketing régénératif.
Le monde qui nous entoure change constamment, et par conséquent les gens, leur vie et leurs comportements évoluent également. Il va sans dire que cela impacte leurs diverses habitudes de consommation et donc initie tous les changements de paradigme et de valeurs observés sur le marché.
Du point de vue de l’entreprise, la clé de la rentabilité et de la performance dépend entièrement de la capacité à anticiper ces changements de direction ou à défaut, les intégrer rapidement dans la stratégie commerciale globale.
Ces dernières années, le marketing est passé d'une focalisation sur le produit (marketing 1.0) à une focalisation sur le consommateur (marketing 2.0) et atteindre un marketing aux valeurs responsables ou régénératif.

Marketing 1.0 : publicité et réponse directe axées sur la notoriété, la marque et la promotion des ventes.

Marketing 2.0 : Réponse directe sur Internet avec métriques de performance et reporting. Se concentrer sur les canaux numériques où l'on peut prendre les mesures tactiques et certains aspects des revenus.

Marketing 3.0 : Marketing dynamique basé sur les données et intégré à tous les points de contact avec les clients. Il connaît et anticipe leurs besoins et lui génère de la valeur. Il se concentre davantage sur les expériences, les engagements et la satisfaction de leurs besoins.

Aujourd’hui, on observe un nouveau système de valeurs dans les comportements des consommateurs et par extension, au niveau de la stratégie commerciale apportée en réponse que ce soit en marketing BtoB ou BtoC. Le marketing 3.0 (marketing axé sur les valeurs) est l'étape où les entreprises passent d'une orientation consommateur à une orientation sur la personne.
Idée de réflexions collégiales portées par notre gp… d’un consommateur (ménagère de plus 50 ans) à un citoyen responsable (politique)

Désormais, la recherche du profit est associée à la responsabilité de l'entreprise. Tout comme le marketing 2.0, la doctrine qui sous-tend la conception du marketing régénératif est d’apporter une réponse précise et surtout pertinente aux besoins des consommateurs. Mais dans la perspective du marketing 3.0, les individus ne se contentent plus uniquement des produits. Ils veulent voir des philosophies et des responsabilités. Ils sont désormais à la recherche d'entreprises auxquelles s’identifier, des marques qui se soucient de leurs préoccupations personnelles.
Reflexion commune sur le poids des marques Etude Kantar livré au groupe en Mars


Valeur Culturelle

La valeur culturelle est liée au phénomène de mondialisation, qui s'est récemment transformé en « Globalisation » : les gens sont de plus en plus connectés au monde, mais conservent ou redécouvrent des liens locaux forts. La mondialisation présente encore de nombreux revers : il y a encore trop de disparités entre les différentes économies mondiales, comme la forte division entre le Nord et le Sud du monde (ainsi qu'entre l'Ouest et l'Est, avec la Chine dans le rôle de “World Factory”). Il s'ensuit désormais que dans le processus d’optimisation de l’expérience client et de fidélisation de ce dernier, les entreprises doivent afficher des valeurs positives profondément enracinées et qui n'entrent pas en conflit avec celles de leurs audience. Cela se fera à travers la combinaison de produits et de services de qualité avec l'éthique et la considération de l'environnement et des engagements du client.
intervention de JS Seval Soon en fevrier 2023/Technocentre Renault ou Orange


Valeurs technologique et créative
Les nouvelles valeurs Marketing sont d'une importance cruciale pour les entreprises et la société. Il présuppose que la collecte de nouvelles informations provenant de divers groupes de clients via différents types de canaux de communication, affectera profondément le processus de prise de décision. Il permettra par ailleurs à l’entreprise de faire preuve d’un niveau de créativité sans précédent, ou du moins impossible à obtenir avec les anciens concepts marketing traditionnels lorsqu’il s’agit de création de contenu. Les consommateurs ont donc l'avantage de recevoir des produits qui répondent à leurs besoins, désirs personnels et engagements sociétaux. Cela ne peut se faire que si l’entreprise possède de réelles capacités de collecte de données, d’analyse, et si elle dispose de la technologie et des outils marketing appropriés pour les implémenter : passer d'une communication statique à une communication intelligente et pertinente.


Valeur responsable.
Le marketing régénératif est repensé autour d’un nouveau système de valeur où les aspirations des clients et la préservation de la planète sont prises en compte, tout en conservant la rentabilité de l’entreprise. Sobriété heureuse et préservation de la rentabilité sont les deux caractéristiques des valeurs de ce marketing régénératif.
D'un système de valeur basé sur le développement de produits et de valeurs de marques, nous passons vers un nouveau système de valeurs "plus ou moins bien perçu, mais surtout plus rationnel " Et ceci  peut se réaliser par une  nouvelle éducation du consommateur. Créez du contenu qui aide à éduquer et à engager.
Idée émise et développé par groupe « prise en main et guidage parfois ludique du consommateur » - Nudge marketing
L’objectif n’est plus de vendre coûte que coûte, mais de l’éduquer à être responsable  

Valeur Spirituelle
Et en parlant d'éthique et de valeurs, le volet spirituel du marketing 3.0 entend mettre encore plus l'accent sur la vision de l'entreprise. Une vision qui doit accorder une attention appropriée aux clients et aux concurrents, qui méritent tous deux d'être traités avec respect. Gagner leur fidélité signifie donc tirer parti des valeurs les plus profondes de manière claire et cohérente.


Valeur Collaborative
Stimulé par la montée en puissance des réseaux sociaux, l’aspect collaboratif du marketing 3.0 donne aux gens, aux clients, un rôle de premier plan dans la conception et le développement de la vision d’une marque. Ils passent désormais de simples consommateurs à prosommateurs, capables de parler directement avec l'entreprise, de créer du contenu et des contre-récits, de critiquer ou de louer un choix (ou une politique) particulier de l'entreprise par le biais des réseaux sociaux. Une entreprise qui pratique le marketing 3.0 implique son public dans le processus de création du produit, écoute les critiques et les réclamations et les prend en compte pour améliorer son produit ou son “comportement”. En plus de simplement écouter les opinions et prendre des décisions qui définissent leurs feuilles de route, certaines entreprises ont également lancé des programmes de co-création. Les produits et services peuvent ainsi être plus facilement redéfinis, modifiés en fonction des exigences et des besoins des clients.
Créer des produits valables et des expériences d'achat passionnantes pour les clients, et répondant en même temps à leurs valeurs les plus nobles : c'est ça le sens du marketing dit régénérative


Pour conclure …
J’ai essayé à travers ces quelques lignes de dresser un cadre de réflexion, qui encore fois n’a pour objet d’envisager un marketing nouveau ( d’où l’ambiguité de reprendre la notion de 3.0 de P Kotler)  mais d’envisager les nouvelles valeurs que le marketing régénératif à identifier pour répondre aux nouveaux enjeux des consommateurs et surtout de la planète. Reste à nous de s’emparer de ces valeurs et d’identifier quelques idées maitresses que nous développerons et que nous étayerons avec des use cases.
Thierry Bardy
10 novembre 2023

 
Autres matière à disposition des participants du creuset marketing ...
 

La consommation est un objectif essentiel, qui doit désormais s’exercer avec de nouvelles ambitions et dépasser le consumérisme exacerbé que nous connaissons aujourd’hui.

 

Le marketing doit être repensé autour d’un nouveau système de valeur où les aspirations des clients, la préservation de la planète doivent être prises en compte, tout en conservant la rentabilité de l’entreprise. Sobriété heureuse et préservation de la rentabilité peuvent caractériser ce que certains appellent le marketing responsable*
(*) cherche à répondre aux besoins humains, s'envisage à l'intérieur des limites planétaires, vise la restauration du capital naturel, en coopérant avec le vivant.

 

"Less is more" serait-il un profond changement de systèmes de valeur ?

La valeur réduite ou minimaliste pourrait-elle devenir plus importante que la valeur ajoutée ?
Le marketing ou l’innovation de demain devront-ils être redéfinis - marketing inversé, éthique, innovation responsable ?
Le marketing de la demande pourrait-il être amené à renaitre de ses cendres  ?
D'un système basé sur le développement de produits et de valeurs de marques, passerons-nous à vers un nouveau système de valeurs "plus ou moins bien perçu, mais surtout plus rationnel " par la nouvelle éducation du consommateur ?
Demain, l’objectif sera-t-il encore de vendre coûte que coûte ? Comment pourrait évoluer le rôle des consommateurs ?
Comment les publicitaires envisagent-ils de modifier leur rapport avec le produit et la marque?
Quels seront les critères de la valorisation d'une marque de demain, l'ESG va- t-il vampiriser toutes les valeurs d’une marque existante aujourd’hui ?
Comment le publicitaire pourra- t-il revisiter le planning stratégique pour qu’il puisse répondre au nouveau système de valeur d’une  marque ?

 

Economie de la fonctionnalité ou l’émergence de la valeur d’usage et d’échange.

Le système de valeur qui faisait la place belle à la possession et à l’illimité semble se réduire au profit d’autres systèmes s’éloignant de la logique de production/consommation de masse et des impacts sociaux et environnementaux qui en découlent. 

Les valeurs de l’usage ou de la location seront-elles privilégiées ? La location ou l’économie de la seconde vie obligent déjà nombre d’entreprises à repenser leur façon de produire ou de commercialiser leurs produits et services afin de les rendre plus durables. Ces tendances deviendront-elles la norme ? Comment les entreprises pourront-elles encore créer de la valeur sur des volumes en réduction ? Comment pourront-t-elles déplacer leurs modèles économiques vers des produits et services durables tout en restant viables ? Dans ce contexte régressif, comment la sacro-sainte valeur de la data va évoluer  ? Et celle de la traçabilité ? Les entreprises ont-elles intérêt à anticiper ou doivent-elles se laisser porter par les évolutions exogènes et/ou celles de de leurs secteurs d’activité ? 

Comment pourraient évoluer ces différentes tendances à plus long terme ? Et comment l’entreprise devra-t-elle modifier sa raison d’être, ses modèles économiques, son organisation pour répondre à ces transformations de valeur ? 
Thierry Bardy
10 novembre 2023


 

 

 

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Pour aller plus loin...
 

La consommation responsable entre aspirations et principe de réalité

 

Marie Frumholtz
 

Le comportement des clients et leurs valeurs entrent régulièrement en conflit sous l'effet des injonctions contradictoires d'hyperconsommation et de sobriété. Une tension qui s'accroît en période d'inflation.
 

Les Français ont le sentiment d'agir pour la planète. En effet, 89 % d'entre eux considèrent que leur comportement respecte l'environnement, selon le baromètre Maréson-Responsable, dévoilé par la chaire universitaire « Marketing responsable et bien-être » en novembre 2022. La réduction du gaspillage, le recyclage et la consommation de produits locaux et de saison sont cités en exemple. Mais, en parallèle, l'avion est toujours plébiscité - le taux de remplissage des appareils est globalement revenu cet été à son niveau d'avant la pandémie - tandis que la consommation de produits bio diminue… Et « 84 % des répondants ne considèrent pas la réduction de la consommation comme un facteur de consommation durable », révèle l'enquête.

Comment expliquer un tel déphasage, une contradiction aussi criante ? Il y a d'abord le trop-plein d'informations qui finit par en réduire l'efficacité : comment interpréter un message de santé publique incitant à manger moins sucré apposé en petits caractères sur une publicité pour une barre chocolatée ?
 

Effet rebond

Il y a ensuite un manque de données précises. « Si je ne sais pas combien de litres d'eau je consomme chaque jour, rien ne m'encourage à changer mon comportement », relève Béatrice Siadou-Martin, professeure en sciences de gestion à l'université de Montpellier et membre de la chaire « Marketing responsable et bien-être ». Ne pas quantifier l'impact de gestes dits écoresponsables, comme éteindre la lumière par exemple, n'incite pas à les adopter.

Le consommateur, lui, trouve toujours à se justifier. « Il met en place plusieurs stratégies, comme se comparer favorablement aux autres pour valoriser son comportement. La logique de compensation est aussi souvent invoquée : je me déplace quotidiennement à vélo donc je peux prendre l'avion pour partir en vacances », souligne Béatrice Siadou-Martin. La machine se grippe aussi lorsque le changement de comportement implique des coûts financiers et psychologiques que le consommateur n'est pas prêt à accepter. Le statu quo lui semble alors plus confortable. « Chaque personne résiste au changement, dans n'importe quelle culture, car les routines sont rassurantes et nous permettent de faire société », rappelle Fanny Parise, anthropologue et auteure d'un essai sur le mythe de la consommation responsable.

Aussi, plutôt que de taxer les individus d'hypocrisie, il faudrait prendre en compte le contexte économique et social. « On ne peut pas reprocher aux citoyens de consommer, car nous sommes dans une société d'hyperconsommation où tout est déployé de manière très sophistiquée pour inciter à consommer. Les publicités personnalisées encouragent cela. Notre société valorise encore l'accumulation de richesses », appuie Guénaëlle Gault, directrice générale de l'ObSoCo (l'Observatoire société et consommation). D'où le fait que certaines innovations qui semblent de prime abord positives, comme Vinted, plateforme qui permet la revente de vêtements entre particuliers et donc de moins acheter de vêtements neufs, encouragent en réalité à consommer davantage tout en ayant bonne conscience. C'est ce que l'on dénomme l'effet rebond.

La pandémie et le contexte inflationniste n'ont pas bouleversé la donne. Selon la deuxième édition de l'Observatoire de la consommation responsable, réalisé par l'ObSoCo et Citeo, la sensibilité environnementale des consommateurs s'est cependant légèrement atténuée par rapport à 2020. Les contraintes, surtout financières, sont en revanche plus prégnantes, ce qui n'est pas forcément antinomique. « Une sobriété choisie se croise désormais avec une forme de sobriété subie. Les gens n'ont pas que des réflexes écologiques ou économiques, ils ont les deux », affirme Guénaëlle Gault .
 

Retour du vrac et du troc

Les consommateurs se sont adaptés au contexte. « Depuis la crise sanitaire, nous sommes passés de 37 % de Français qui achètent des produits en vrac à 30-32 %. Cette période a bouleversé nos déplacements, nos consommations, notre rapport au temps… et a favorisé les solutions de livraison instantanée », estime Célia Rennesson, cofondatrice et directrice générale du Réseau Vrac et Réemploi. D'un autre côté, les rayons antigaspi, proposant des produits à prix réduits avec une date de péremption très courte, se sont développés, de même que l'upcycling, c'est-à-dire la création de nouveaux produits à partir d'anciens, dans l'ameublement, l'habillement, etc.

Le troc fait aussi son grand retour. L'application Geev, plateforme de dons d'objets entre particuliers, lancée il y a six ans, compte aujourd'hui 4,5 millions d'utilisateurs inscrits, d'après son cofondateur et CEO Hakim Baka. Le principe est simple : en donnant un objet, on gagne le droit d'en récupérer un autre, peu importe que l'on ait donné un livre ou un meuble, tout se vaut. Les non-abonnés peuvent récupérer jusqu'à 5 objets par mois, ce chiffre monte à 30 pour les abonnés, afin d'éviter les abus. « Nous avons enregistré une hausse d'activité avec l'inflation, mais je ne pense pas que cela soit temporaire. L'habitude a été prise par nos utilisateurs et je pense que les contraintes sur les prix des produits neufs (écotaxes, coûts de production, etc.) vont s'accentuer à l'avenir. Nos manières de consommer vont devoir changer sur le long terme », avance Hakim Baka.
 

Les entreprises en première ligne

Changer les habitudes des consommateurs demande du temps et de la pédagogie. Les « nudges », ces incitations discrètes pour encourager de nouveaux comportements, comme des poubelles de tri ludiques ou un signal-prix fort qui intégrerait les coûts sociaux et environnementaux des produits, sont les principales solutions retenues aujourd'hui. Mais cela n'est pas suffisant, car ces méthodes font reposer le poids du changement sur les épaules des individus. « Ce n'est pas au consommateur de faire tous les efforts. La généralisation du vrac et du réemploi se planifie grâce aux changements de lois et un accompagnement des industries, sinon on n'y arrivera pas », rappelle Célia Rennesson.

Les injonctions à la sobriété ne doivent pas non plus se transformer en offre prête à l'emploi remplaçant un produit A par un produit B étiqueté responsable. Non seulement la consommation est toujours encouragée, mais en plus, « si le produit B est plus cher, on crée une inégalité d'accès, surtout en contexte inflationniste, comme avec la voiture électrique », avertit Fanny Parise. En creusant les inégalités, on accentue la fracture sociale et cela d'autant plus que le prix reste le premier critère de choix des consommateurs. « C'est aux acteurs de l'offre d'agir : aux entreprises de se mettre en adéquation avec les aspirations des consommateurs et non l'inverse », conclut Guénaëlle Gault.

Consommer, entreprendre, coopérer autrement : l'économie selon la Génération Z lesechos.fr/thema

 

Interdire la publicité pour une consommation plus responsable ?

 

Cet article s’inscrit dans le cadre du sommet NextGen sur la transformation des entreprises. Pierre Sinodinos, PDG d’Aneo a eu le plaisir d’y participer les 26 et 27 novembre derniers. Elle fait partie des 149 propositions issues des travaux de la Convention Citoyenne pour le Climat et est réclamée par de nombreuses ONG. La proposition d’ « interdire de manière efficace et opérante la publicité des produits plus émetteurs de Gaz à effet de serre sur tous les supports publicitaires » prend de plus en plus de place dans le débat public.

Indispensable ou inefficace, la régulation du secteur publicitaire est-elle un levier à notre portée pour consommer de manière raisonnée et réduire notre empreinte écologique ? Ma réponse est oui. Pourquoi réguler la publicité ?

1) Rationaliser nos comportements d’achat Elle est aujourd’hui omniprésente sur nos écrans d’ordinateurs, les réseaux sociaux, les panneaux d’affichage ou les chaînes de télévision…
La publicité fait partie de notre quotidien. En 2016, 88 % des Français estimaient que la publicité jouait un rôle dans le choix des enfants à l’achat de jouets et produits de divertissements (1). La publicité utilise divers discours d’influences ou biais cognitifs qui renvoient à des phénomènes conscients et inconscients chez l’individu. Ces biais jouent à la fois sur notre rationalité, mais aussi et surtout sur un ensemble de facteurs émotionnels. Cela rend donc difficile l’évaluation de son impact réel. Aujourd’hui, la publicité utilise un ensemble de types de discours et de mécanismes d’influences pour induire nos comportements d’achat. Il est devenu presque impossible d’agir avec raison et calcul lorsque l’on consomme un produit : « le produit devient moins important que le discours qui est produit sur lui » (2). Parallèlement à ce phénomène, le développement du e-commerce, du marketing d’influence, et des réseaux sociaux ont amplement simplifié nos parcours d’achats. Exit l’homo œconomicus rationnel, le consommateur est aujourd’hui un être de désirs immédiats ; à l’analyse rationnelle des bienfaits d’un achat s’est substituée une pulsion presque infantile du besoin de consommer. La régulation me semble être ainsi un premier pas pour conscientiser nos comportements d’achat et remettre de la rationalité là où l’émotion semble l’avoir supplantée. Enfin, cela permettrait de nous réapproprier notre « temps de cerveau disponible ».

2) Aligner le discours publicitaire avec nos valeurs La publicité joue un rôle essentiel dans la définition de nos valeurs de sociétés. Elle promeut des « produits qui incorporent des idéaux sociétaux liés aux aspirations des individus (…) qui n’ont plus qu’un lien extrêmement ténu avec leurs bénéfices fonctionnels »(3). Parce que largement diffusé, le discours porté par la publicité en devient normatif. En effet, il contribue à définir nos besoins, nos idéaux, nos aspirations. Il stéréotype notre quotidien et s’impose comme notre référence.

En 2019, dans un contexte pré-Covid19, l’environnement était devenu la première préoccupation des Français, devançant même le pouvoir d’achat (4). Cette préoccupation croissante pour la préservation de l’environnement est une tendance de fond qui se confirme à tous les niveaux : augmentation de l’usage des modes de transports propres, percée inédite des écologistes aux dernières élections municipales, engagement croissant des marques dans des politiques RSE ou de développement durable… Pourtant, le marché publicitaire continue de faire la part belle aux produits polluants.
Prenons un exemple concret : les SUV. Ces véhicules ont bénéficié d’une hausse de 16 % dans les budgets publicitaires en 2020 (5). Pourtant, selon l’Agence Internationale de l’Énergie (AIE), ces véhicules représentent le deuxième facteur contribuant à l’augmentation des émissions mondiales de CO2 depuis 2010, après le secteur de l’énergie, mais devant l’aviation ou les poids lourds.

En 2018, les SUV représentaient près de 36,5 % des véhicules vendus dans l’hexagone en croissance constante depuis plusieurs années (6). Je crois qu’il est temps de s’assurer que la puissance de l’instrument publicitaire soit mise au service des valeurs de notre société. Le mécanisme de régulation de la publicité est à mon sens une opportunité d’aligner nos valeurs avec le discours publicitaire, de s’assurer que les entreprises et le capitalisme en général soient cohérents avec le projet de société qui est le nôtre, avec notre engagement commun, notamment en matière d’écologie.

3) Interdire la publicité pour moins et mieux consommer Selon le baromètre Greenflex de la consommation responsable, en 2019, 88 % de Français estime que les entreprises incitent à la surconsommation par la publicité, en proposant toujours plus de nouveautés (7). Le développement de la Fast Fashion, le Black Friday, les soldes sont le cœur d’expression des publicités. Alors que de plus en plus de voix s’élèvent contre cette course à la surconsommation, au zéro déchet et à des modes de vie plus sobres, la publicité nous incite toujours d’avantage à posséder ce qui est nouveau, ce qui assouvira un besoin qui semble infini. La régulation du secteur repose donc sur une logique simple : diminuer l’exposition marketing aux produits nocifs pour l’environnement pour réduire l’envie de les acheter.

Où en est-on aujourd’hui ?
1) Une autorégulation du secteur qui fonctionne mal Le secteur publicitaire fonctionne aujourd’hui en grande partie sur un mécanisme d’autorégulation. L’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) est un organe professionnel dont la mission est « d’œuvrer en faveur d’une publicité loyale, véridique, saine et respectueuse » (8). Toutefois, à plusieurs reprises, cet organe n’a pas prouvé son efficacité. En témoigne le départ de l’association France Nature Environnement du conseil paritaire de la publicité en 2020 affirmant que l’autorégulation de la publicité était un échec. En 2018, l’ADEME avait déjà critiqué une décision du jury de déontologie publicitaire pour ne pas avoir condamné une campagne de publicité proposée par Cdiscount qui incitait à la surconsommation.

2) Une proposition de loi : la loi Evin pour le climat Défendue par le député Mathieu Orphelin, la proposition de loi « actant de premières mesures pour faire de la publicité un levier au service de la transition écologique et de la sobriété et pour réduire les incitations à la surconsommation » (9) n’a pour l’heure pas été retenue par la Commission pour développement durable de l’Assemblée nationale. Pourtant cette proposition rebaptisée « Loi Evin du climat » en référence à la loi Evin de 1991 qui interdit la publicité pour le tabac et encadre celle de l’alcool, propose en outre d’interdire progressivement toute publicité portant sur des produits et services à fort impact négatif sur l’environnement. Le tout en veillant à ne pas enfreindre les libertés d’expression et d’entreprendre. Cette interdiction s’appliquerait ainsi à toutes les formes de publicité. Y compris réalisées en ligne ou par courriel et aurait un effet contraignant au même titre que la loi Evin qui promet des sanctions financières au contrevenant.

3) Un instrument d’information et de régulation : le CO2 score. Pour définir cette liste de produits et services nocifs pour l’environnement, la Convention Citoyenne pour le Climat propose de mettre en place un CO2 Score. De la même façon que le Nutri-score, cet outil permettrait facilement d’identifier les produits polluants. Le CO2 score serait élaboré par un organisme public « sur la base des normes existantes et/ou du bilan carbone de l’ADEME », l’agence de la transition écologique. Il devra prendre en compte l’entièreté du cycle de vie d’un produit ou d’un service et intégrer les émissions directes et indirectes. Ainsi, chaque étape devra être évaluée : « fabrication / extraction et acheminement de matières premières, fabrication, stockage, transport vers le lieu de distribution, distribution, consommation, jusqu’à son traitement en tant que déchet ou son recyclage (10). La mise en place d’une telle mesure permettrait à la fois d’évaluer de manière objective et explicite l’impact environnemental de biens consommés, de définir ceux à bannir de nos écrans, et d’informer et responsabiliser le consommateur. Cette proposition répond à une exigence des consommateurs pour plus de transparence sur les produits qu’ils consomment. l’usage des applications comme Yuka (qui note et informe sur la composition des produits alimentaires et cosmétiques) qui compte pas moins de 10,5 millions d’utilisateurs en France, peut en témoigner. Alors à quand un Yuka de l’environnement ? Quels seraient les risques d’une telle mesure ? Interdire la publicité de produits polluants risque de faire porter au secteur publicitaire un trop lourd tribut. Cela représente au contraire une formidable opportunité de faire pivoter le secteur pour qu’il devienne un moteur dans la transition écologique. Ce pivot est déjà en cours. En effet, la chaîne de télévision TF1 a pris la décision de lancer prochainement un programme intitulé « EcoRespons’Ad ». Il s’agit d’une offre publicitaire spécifique imaginée avec l’ADEME. Des espaces dédiés pour mettre en avant des publicités responsables lors d’une heure de grande écoute. On peut aussi citer la start-up BackMarket, spécialisée dans le reconditionnement de produits tech. Par exemple, cette dernière utilise la publicité pour promouvoir l’économie circulaire. Cette mesure pénalisera les industriels et producteurs. La régulation est un moyen progressif et transitoire d’inciter à la reconversion de ces entreprises vers des produits à faible impact environnemental. Les industriels l’ont déjà compris et les changements sont à l’œuvre. En effet, les investissements publicitaires des constructeurs en faveur des véhicules dits « propres » ont considérablement augmenté sur les huit premiers mois de 2020. Ils concentrent 23 % du budget global, contre seulement 9 % en 2019 (12). L’interdiction qui repose sur le principe d’écologie punitive n’est pas efficace. Cette proposition doit évidemment s’envisager comme une mesure dans un arsenal plus complet (taxation des produits polluants, soutien à l’innovation, aide à la reconversion professionnelle, etc.). Nous sommes à la croisée des chemins entre une politique écologiste timide aux résultats mitigés et une écologie de rupture qui propose des mesures radicales aussi incitatives que contraignantes pour atteindre collectivement notre engagement. Alors, avons-nous vraiment le choix ?
 

Un article rédigé par : Perrine Croatto Head of Marketing & Communication chez Aneo Avec l’aide de : Pierre Sinodino PDG et Fondateur d’A Sources : (1) https://fr.statista.com/statistiques/647363/influence-publicite-choix-consommation-enfants-jeunesse-avis-sitatuin-familiale-france/ (2) « La faute à la pub ? », La Cause du Désir, vol. 88, no. 3, 2014, pp. 65-69. (3) Heilbrunn B., 2007, La Marque, Paris, Presses universitaires de France, 2010 (4) Sondage Sopra Steria 2019 – https://www.lepoint.fr/environnement/l-environnement-premiere-preoccupation-des-francais-16-09-2019-2336036_1927.php (5) Etude Kantas – https://pro.largus.fr/actualites/publicite-automobile-les-vehicules-propres-toujours-plus-presents-10430405.html (6) Plus de véhicules électriques, trop de SUV Faits et chiffres tirés de ADEME & Vous Le Mag n° 126 (7) Baromètre GreenFlex – https://www.greenflex.com/communique-de-presse/barometre-consommation-responsable-2019-sortons-mythe-croissance-infinie/ (8) https://www.arpp.org/qui-sommes-nous/roles-et-missions/ 9) Proposition de loi actant de premières mesures pour faire de la publicité un levier au service de la transition écologique et de la sobriété et pour réduire les incitations à la surconsommation. – http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b3289_proposition-loi (10) Consommation : le futur indicateur « score carbone » en cinq questions, Neïla Beyler – https://www.lesechos.fr/politique-societe/societe/consommation-le-futur-indicateur-score-carbone-en-cinq-questions-1255908 (11) Etude Kantas – https://pro.largus.fr/actualites/publicite-automobile-les-vehicules-propres-toujours-plus-presents-10430405.html (12) Convention Citoyenne pour le climat, Réguler la publicité pour réduire les incitations à consommation – https://propositions.conventioncitoyennepourleclimat.fr/objectif/reguler-la-publicite-pour-reduire-les-incitations-a-la-surconsommation/dans le débat public. Indispensable ou inefficace, la régulation du secteur publicitaire est-elle un levier à notre portée pour consommer de manière raisonnée et réduire notre empreinte écologique ?


 

L'assaut des marques sur le récit national

 

Virginie Jacoberger-Lavoué
 

L'essayiste et communicant Raphaël Llorca décrypte comment les marques se sont emparées du récit national en panne.
 

L'emprise des marques n'a pas seulement la scène internationale pour terrain de jeu. Dans « Le roman national des marques, le nouvel imaginaire français », l'essayiste Raphaël Llorca explique comment les marques, après avoir façonné les identités individuelles, cherchent à redéfinir les identités collectives et se font « architectes invisibles » des imaginaires politiques. Selon l'auteur, cofondateur, à la Fondation Jean-Jaurès, de l'observatoire Marques, imaginaires de consommation et politique, le monde marchand veut imposer sa vision du pays. Les marques se sont emparées du « roman national », traditionnellement élaboré par le pouvoir politique et transmis par l'école ; un roman en panne. Les Renault, SNCF, Leclerc, Ikea ou encore Netflix ne se contentent plus d'accroître « l'origine commerciale de notre imaginaire collectif » identifiée déjà par Roland Barthes, mais prennent le pouvoir sur ce qui nous lie dans la société. Ce bataillon de marques a profité du vide laissé par les politiques. Jusqu'ici, le phénomène, qui s'apparente à une privatisation du roman national, était passé sous les radars. Comme le soulignait récemment Cécile Cornudet dans une chronique pour « Les Echos », l'ouvrage sorti mi-septembre a vivement intéressé Emmanuel Macron. « Il appartient au monde politique de prendre acte de l'entrée de ces nouveaux acteurs sur le marché́ de l'imaginaire politique » prévient Raphaël Llorca.

L'emprise des identités collectives : « Qui, aujourd'hui, forge nos représentations collectives ? […] De plus en plus de marques de grande consommation, tous secteurs confondus, se sont mises à défendre leur propre vision du pays. »

L'esprit des marques : « Il est coutume de ne présenter que la face sombre, et de n'en retenir que les aspects négatifs : instrumentalisation à des fins marchandes, mensonges voire manipulations. Ces critiques peuvent être justifiées, mais efforçons-nousd'aborder une face plus lumineuse : le rôle des marques dans le renouvellement du 'plébiscite de tous les jours' qu'évoquait Ernest Renan […]. En s'emparant de la France comme objet de discours, […] en devenant de nouveaux émetteurs du récit national, les marques ouvrent la possibilité de s'adresser à des publics qui étaient jusqu'alors éloignés du sujet. »

En Amérique, des marques contre-pouvoirs ? : « En 2016, l'élection de Donald Trump a constitué une nouvelle étape dans la politisation du discours des marques américaines. Elles ont su tirer à leur avantage l'effacement du parti démocrate qui, sonné par une défaite qu'il n'avait pas anticipée […]. Dans un espace public américain historiquement binaire, il a soudainement manqué d'émetteurs puissants et crédibles pour défendre la vision progressiste de l'Amérique : c'est dans ce vide politico-médiatique que plusieurs grandes marques américaines se sont insérées, pour s'ériger en véritables contre-pouvoirs. »

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