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  • Photo du rédacteurThierry Bardy

CSRD, CSDD, DEE… un naufrage bureaucratique

Gilles Babinet

La CSRD, ça ne vous dit rien ? Il s'agit pourtant d'une réglementation centrale de conformité environnementale de l'Union européenne. Et la CSDD ? C'est un texte si proche de la CSRD que les juristes eux-mêmes ne distinguent pas très bien sa singularité. Le CBAM ? C'est une taxe carbone aux frontières de l'Europe qui entrera en vigueur progressivement avec de nombreux volets et conditionnalités. La réglementation Seqe ? Le réglement Reach ? La directive DEEE ? Plus de 5.000 pages de nouvelles contraintes réglementaires auraient été introduites par l'Union européenne ces dernières années, ce qui, selon certains, irait jusqu'à expliquer la baisse des IDE (investissements directs étrangers) que l'on observe ces dernières années.

Comment concilier l'objectif d'exigence environnementale forte que s'est fixé l'UE avec la performance économique ? Car si seuls les Européens font d'importants efforts, le risque d'un décrochage compétitif n'est pas à exclure. Pour le moment, les Chinois ont reporté à 2060 leur objectif de neutralité carbone et ouvrent plusieurs centrales thermiques par semaine. Au pays du Milieu, les exigences environnementales semblent désormais secondaires face à la nécessité de relancer la croissance à tout prix. Quant aux Américains, ils pratiquent, au prétexte d'une transition vers un mode de production « vert », un dumping industriel agressif avec l'Inflation Reduction Act, mais de contraintes, point, ou très peu.

On comprend que nos industriels nationaux aient un petit moral et que, sondage après sondage, ils se plaignent d'une inflation bureaucratique qui complexifie considérablement leurs opérations. De quoi parle-t-on ? Principalement d'un changement de modèle qui voit des experts de leurs disciplines, au savoir-faire spécialisé et verticalisé, devoir devenir des acteurs transversaux : identifier en amont les fournisseurs à faible impact environnemental et en aval, développer des modèles d'affaires plus vertueux, induisant réduction de l'empreinte énergétique lors de l'usage de leurs produits, réparabilité, recyclabilité… Et tout cela doit donc être explicité, documenté, car la réglementation l'imposera bientôt.

Pour l'Europe, sombrer dans la bureaucratie serait suicidaire. Il existe toutefois un autre projet : utiliser la technologie pour simplifier les échanges sans sacrifier les exigences environnementales. Il s'agirait de renforcer les liens entre l'agenda numérique de l'UE et l'agenda environnemental. Les fondements mêmes d'une telle approche existent. Peepol par exemple, est un projet européen defacture électronique : en accélérant sa mise en place et en généralisant au sein de ces e-factures le reporting des exigences environnementales, les entreprises pourraient s'éviter de complexes déclarations intermédiaires. Le Digital Product Passport permet par ailleurs de connaître précisément, au sein de l'ensemble de la production européenne, l'ensemble des caractéristiques environnementales d'un produit, au sens de la CSRD, la nouvelle exigence de l'Union qui terrifie déjà beaucoup d'industriel.

L'idée générale serait de maximiser l'emploi de formats de données et de principes d'automatisation évitant la création de systèmes bureaucratiques supplémentaires. L'intelligence artificielle pourrait de surcroît être un auxiliaire remarquable pour optimiser la qualification de ces données et leurs formats d'échanges et de reporting. Reconnaissons-le : l'Europe est fortement en retard sur le plan technologique. Rien ne sert de courir derrière, seule une approche de rupture peut lui réussir. Rapprocher numérique et environnement pourrait être ce projet.

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