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  • Photo du rédacteurThierry Bardy

Pour une révolution organisationnelle des entreprises

Charles Bianchi


Après le taylorisme des années 1910-1920, les business units des années 1950-1960, les années 1990 ont vu naître la « world company », entreprise devenue globale avec la mondialisation et recentrée sur son coeur de métier grâce à l'externalisation de ses activités non stratégiques. Portée par la vague des fusions-acquisition, l'influence grandissante des cabinets de conseil en stratégie et l'essor des prestataires d'outsourcing, cette mutation des multinationales a conduit à une suroptimisation des effectifs, souvent critiquée pour sa déshumanisation et son efficacité discutable. En réaction, pointe aujourd'hui la quatrième révolution organisationnelle, avec la « blended company ».

Au début du XXIe siècle, un modèle de gestion par projet a progressivement émergé, en rupture avec les lignes opérationnelles et les fonctions transverses traditionnelles des entreprises. Catalysé par l'avènement du numérique et la volatilité de l'environnement des affaires, ce nouveau schéma semble imposer une disruption continuelle, voire une désorganisation structurelle. Pourtant, bien appréhendée, cette approche de gestion intégrée dans une blended company offre aux grands groupes l'agilité après laquelle ils courent.

La blended company est le nouveau modèle organisationnel des années 2020. Axée sur la gestion des grands projets et des chantiers de transformation de l'entreprise, elle adopte une structure à géométrie variable, mouvante dans le temps. Elle puise sa force dans des strates de ressources humaines complémentaires : ses salariés permanents garants du savoir-faire et de l'ADN maison, des professionnels spécialisés (cabinets de conseil, prestataires de services externalisés) et, à présent, des free-lances intérimaires.

Une blended company du secteur technologique peut combiner un socle permanent de développeurs IT internes, complété au rythme des évolutions du produit par des free-lances, tout en s'appuyant sur des consultants et financiers de boutiques spécialisées (lors de ses opérations de levée de fonds et de croissance externe), sur des free-lances pour gérer certains projets, et sur des prestataires chargés de la gestion des parties standardisées de l'IT et du service client. En contrepartie de son efficacité, la gestion de ces ressources multiples impose une vision plus globale et à plus long terme mais surtout de l‘anticipation (résumée par l'expression « total workforce management »). Autrement dit, l'allocation préalable des ressources avec un fin calibrage (projet par projet), le pilotage dynamique de leur utilisation, et surtout un suivi budgétaire unifié.

Perdre du temps pour en gagner

Ces efforts paient dès lors qu'ils évitent les quatre effets indésirables de l'externalisation : une répartition déséquilibrée et subie entre ressources externes et internes, des biais dans l'arbitrage entre ce qui relève de la masse salariale et des frais généraux, une dépendance excessive envers les cabinets de conseil et les prestataires IT et des coûts superflus liés à une sous-traitance mal ciblée de super-projets qui dérapent.

Faire fonctionner une blended company repose sur deux modes opératoires fondamentaux. Il convient d'abord de définir les priorités de l'entreprise, en déclinant la stratégie en projets et en statuant de façon régulière sur leur priorisation. Puis d'adapter constamment les ressources à ces priorités en opérant des choix (« faire ou acheter » ?) pour chaque projet. Par exemple, en affectant les ressources internes clés de l'entreprise à ses projets stratégiques, et en comblant les lacunes organisationnelles temporaires avec des free-lances intérimaires.

Ce modèle offre une flexibilité complète, permettant une adaptation constante de l'envergure de l'entreprise, projet par projet. Il optimise les coûts en arbitrant entre les différentes strates de ressources internes et externes, et pilote les ressources humaines avec une vision à long terme, anticipant les fonctions qui doivent être internalisées pour renforcer le savoir-faire et la culture internes.

Si ces principes sont déjà partiellement appliqués dans le domaine du numérique, leur adoption généralisée devient cruciale pour les grandes entreprises qui doivent s'atteler à leur transformation.

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